L’École Georges Méliès, 25 ans au service de l’image animée
Article réalisé par le Centre National du Cinéma et de l'Image Animée
L’École Georges Méliès, 25 ans au service de l’image animée
Située à Orly, au sud de Paris, l’école de cinéma Georges Méliès forme depuis vingt-cinq ans des « artisans de l’image ». Son directeur et fondateur, Franck Petitta, en raconte l’ADN, l’adaptation aux défis technologiques contemporains, et la manière dont il envisage l’avenir alors que sa structure figure parmi les 68 lauréats de l’appel à projets « France 2030 – La Grande Fabrique de l’image » porté par le CNC.
Franck Petitta peut être fier : l’un de ses premiers élèves, Guillaume Rocheron, a reçu le Génie d’honneur au festival des effets spéciaux du PIDS Enghien 2024. Le superviseur des effets visuels, qui a travaillé sur de nombreux films américains comme L’Odyssée de Pi, Ad Astra, Nope, est en effet issu de la première promotion de l’école. En 2019, il a même décroché l’Oscar des meilleurs effets visuels pour 1917 de Sam Mendes. Implantée à Orly depuis 1999, l’École Georges Méliès forme des « artisans de l’image ». Un terme sur lequel Franck Petitta aime insister. « C’est l’ADN de l’école, explique-t-il. Notre philosophie est de travailler entre le monde de la tradition et le monde du numérique. Et qu’est-ce qu’on appelle tradition ? La peinture, la sculpture, le dessin, la mode graphique, la photographie, la caméra… Tout cela vient nourrir l’image numérique. »
Formes et techniques
Stop-motion, animation « traditionnelle » ou animation par ordinateur… : l’école qui emprunte son nom au premier grand cinéaste à avoir imprimé l’imaginaire sur pellicule, forme ses élèves aux métiers de l’image animée dans toutes ses formes et ses techniques. L’établissement propose une prépa Beaux-Arts et cinéma – facultative – pour intégrer ses bancs, et par ailleurs deux filières en master 2, développées en partenariat avec l’Université Paris-Est Créteil (UPEC) et l’Institut national de l’Audiovisuel (INA) : un cursus « artisan de l’image animée » orienté cinéma d’animation, et un cursus « artisan du cinéma et des nouvelles technologies » tourné vers le jeu vidéo. En cinquième année, les 300 étudiants qui suivent ces parcours peuvent se spécialiser en « animation de personnages » ou en « images et effets spéciaux ». « Ce qui prime dans la première spécialité, c’est la volonté de prendre un crayon, des feutres, de construire sa carrière à travers le dessin. En revanche, la deuxième spécialisation valorise, elle, toutes les nouvelles technologies liées à l’image. », résume Franck Petitta, qui insiste aussi sur la spécificité de l’animation des personnages par rapport au motion design en général, lequel permet de créer des logos, des génériques ou encore des effets d’ambiance. « Les fondamentaux sont enseignés tout au long de la scolarité : c’est seulement à la fin, lors de leur projet de fin d’études, que les étudiants mettent en avant leur spécialisation. C’est fondamental. En se spécialisant trop vite, après une année de tronc commun, on risque de ne pas avoir une vision globale de la chaîne de fabrication, et ce d’ailleurs, quelle que soit l’industrie : le cinéma d’animation, les effets spéciaux, le jeu vidéo, l’architecture, l’image médicale… ».
Franck Petitta est intervenu le 8 février lors de la conférence « Formateurs aux techniques innovantes : savoir rester dans le coup », dans le cadre du Paris Images 2024.
Objectif 2030
Le cinéma, au cœur de la formation de l’école, compose 50 % de ses programmes. Les étudiants apprennent à faire du cinéma en « vrai », sur un plateau, à travers le tournage, l’éclairage, le montage, la diffusion… Ils utilisent des fonds verts et des écrans LED, s’initient à la volumétrie et aux différentes « captures », de mouvement ou de performance. « Avec l’objectif d’en faire des jeunes polyvalents dans le secteur du cinéma », explique Franck Petitta. Association loi 1901, l’École Georges Méliès propose également des cours du soir gratuits, a investi dans des bâtiments écologiques et coproduit des films d’animation caritatifs, avec la fondation Abbé Pierre, les Enfoirés, les Restos du cœur et France Nature Environnement. L’établissement fait par ailleurs partie des 68 lauréats de « La Grande Fabrique de l’image », le volet du plan de relance France 2030 dédié aux studios de tournage, aux studios de production numérique et à la formation aux métiers de l’image. La structure a planché pendant un an et demi pour mettre sur pied son projet France 2030 « Artisans de l’image ». En collaboration avec l’INA et l’UPEC, l’École Georges Méliès projette de doubler en cinq ans le nombre de personnes formées, en adaptant continuellement sa pédagogie aux évolutions technologiques, et en poursuivant un double objectif d’inclusion et de décarbonation. « Notre ambition est de développer les liens entre l’industrie du film d’animation et des effets spéciaux et ceux du jeu vidéo et de l’architecture, précise Franck Petitta. Nous souhaitons aller chercher les lycéens pour les aider à découvrir les métiers de nos filières, les technologies en cours de développement. Ils doivent se poser des questions sur leur avenir, bien avant le baccalauréat. Il faut qu’ils s’interrogent : quel outil souhaitent-ils prendre en main pour raconter des histoires : le crayon, le dessin ou la caméra ? ».
L’artisanat face à l’avenir
À la rentrée 2024, l’École Georges Méliès proposera également une troisième spécialisation, « direction artistique et narration », consacrée à la préproduction « narrative ». « Créer une image revient à créer une histoire, rappelle Franck Pettita. Savoir tenir une caméra sur un plateau, éclairé pour de vrai, puis refaire le même geste dans un logiciel 3D, fait appel aux mêmes principes fondamentaux. Il faut savoir poser une focale, cadrer correctement, comprendre le mouvement de la caméra, donc la narration. Même une image fixe doit intégrer une part de narration. C’est pourquoi le terme “artisan” est crucial ». Aujourd’hui, l’école réfléchit aux défis posés par l’intelligence artificielle. « L’IA, ce n’est pas un outil, c’est une machine. Un crayon, c’est un outil. Une machine, c’est quelque chose qui remplace l’homme. L’IA est là, on ne pourra pas la supprimer. Il faut apprendre à la dompter, affirme Franck Petitta. Cela signifie également qu’il faut défendre une certaine éthique dans la création. Il faut s’en servir pour raconter des histoires d’une manière particulière : la création sera toujours à réaliser dans une zone de tempérance, de calme, d’apaisement… La création réclame de prendre son temps. L’IA pourra servir à réaliser un “rough” [un croquis de composition ou un brouillon – ndlr], à faire de la recherche ou à explorer des rendus graphiques particuliers, mais ne remplacera jamais l’homme. »